dimanche 22 mai 2016

Rue des azalées

Rue des azalées
Sous l'arc-en-ciel de parfums-
Le passant s'arrête...
J.B.

lundi 16 mai 2016

la neige

Neige sous le pommier?
Pétales éparpillés
Au gré du printemps
J.B.

jeudi 5 mai 2016

poesie

Poésie, phénomène de société, pour combien de temps encore ?
Certains annoncent la fin de la poésie. Ce genre d’expression littéraire n’aurait plus sa raison d’être. La poésie serait en crise. Des mouvements pareils à l’école de Rochefort-sur-Loire, né pendant la guerre, ou le Surréalisme qui lui suivit, n’ont pas de véritables héritiers, les poètes actuels se caractérisant de plus en plus par leur individualisme.
D’autres rétorquent que la poésie n’est qu’en phase d’autocritique et de rénovation. Elle se chercherait pour se reprendre de plus belle. Il n’y aurait pas lieu de s’en faire. Patience donc. Ne faudrait-il pas plutôt parler de crise du lectorat qui préfèrerait se distraire par la lecture de best-sellers ?
Moi, je ne sais pas. Je lis aussi des romans, et j’en ai écrit et je sais que roman et poésie sont de nature différente. Je ne crois pas qu’ils se fassent concurrence, simplement ils ont des publics de lecteurs différents.
Crise ou pas crise, on n’a jamais autant écrit de poésie. Trop peut-être. Le poète ne se fabrique pas. On est ou on n’est pas poète, dans sa façon d’être, de regarder, de voir, d’aimer, de détester, de faire ou de ne pas faire. Et cela bien avant de prendre la plume pour chanter ou abominer le monde.
Il n’est pas impossible que la multiplication à laquelle on assiste ne soit pas bénéfique à la qualité des écrits poétiques. Mais la question n’est sans doute pas là. Les ateliers d’écriture ouvrent-ils les portes à la démocratisation du phénomène poétique, donnent-ils naissance à des vocations ? Parfois, sans doute. Les concours de cercles littéraires stimulent la création littéraire des débutants. Les réseaux sociaux fourmillent de haïkus, plus ou moins réussis. On peut dire que les
haïkus sont devenus un produit à la mode à la portée de tous, même de ceux qui ne sont pas de véritables poètes, mais avec les résultats variables.
Jean-Claude Pinson, essayiste français, pense qu’il faut élargir la poésie au plus grand nombre et poursuivre par là un enrichissement de la personnalité de chacun, sans se soucier de la qualité des écrits. Il y a chez chacun « quelque chose de Tennessee ». La poésie est une dimension de l’existence. Il suffit de la découvrir. Et ensuite de la développer. Mais n’est ce pas utopique ? Comment enseigner pareil goût pour la beauté dans le monde où nous vivons et avec quels moyens. N’est-ce pas véritable œuvre d’apôtre ? La poésie comme une religion ? Si le résultat de ces efforts n’aboutit pas à créer des talents, du moins favorisera –t’il l’éclosion de lecteurs de poésie. On verrait ainsi naître ce que Pinson baptise de « poétariat ».À tout le moins devrait-on voir diminuer l’allergie d’une partie du grand public pour la poésie.
Pour l’homme moderne le poète, même bon et original, est inutile. Cependant même inutile il est nécessaire à la société. Il lui apporte un enrichissement spirituel indispensable à l’épanouissement de tous. Quand il exprime ses sentiments et ses émotions, il se rapproche de chacun. Le lyrisme du poète écrivain renvoie le lecteur à ses propres expériences et sensations. Et le langage qu’il utilise, en particulier celui de la poésie actuelle, est apte à susciter les émotions des lecteurs, peut-être plus que celui de la poésie classique.
Les sentiments personnels et intimes, l’amour, prédisposent à l’expression poétique. Combien de poètes ne le sont- ils pas devenus parce qu’ils étaient amoureux et qu’ils avaient exprimé leurs sentiments à l’égard de la jeune fille ou plus tard de la femme qu’ils aimaient. De tous temps l’amour a été un thème récurrent de la poésie. Ce qui fait dire à de nombreux écrivains que la poésie ne peut qu’être éternelle. Phénomène de société ou non, la poésie ne disparaîtra donc pas. Elle continuera à s’opposer aux esprits chagrins qui considèrent qu’elle est superflue, qu’elle a eu son temps.
La forme poétique est bien plus adéquate à l’expression des sentiments amoureux que la langue quotidienne (celle utilisée dans la plupart des romans sentimentaux). Le poète n’exprime pas que des sentiments amoureux, la tristesse, la douleur occasionnée par la perte d’un être cher, etc., font partie de son répertoire.
Je pense qu’il n’est pas faux de prétendre également que toutes les fonctions de la poésie –poésie engagée en politique, poésie de la résistance et des grandes causes sociales - passent par l’expression des sentiments. La poésie est d’abord expression des sentiments personnels et des sentiments universels.
Si l’on se tient simplement à une définition de la poésie comme phénomène de société, sans se soucier de la place qu’elle occupe vraiment au sein de la société et de son rôle (rôle politique, rôle d’intermédiaire entre les muses qui l’inspirent et le peuple – qui la lit ou ne la lit pas) en n’analysant que les différentes étapes de sa création, depuis l’acte d’écrire jusqu’à celui de la consommer (fonction économique qui consiste à faire entrer le produit poésie dans la société, la création poétique fait incontestablement partie des phénomènes de société, même sans lecteurs. Comme l’affirme Edgard Pich, professeur d’université à Lyon, beaucoup de recueils sont achetés, manipulés, rangés, oubliés dans les bibliothèques sans être lus. Et quand ils sont lus par de rares amateurs – car il en existe- ce n’est pas nécessairement le texte de l’auteur qui entre en société mais celui compris, critiqué, analysé par ledit lecteur, c,a,d, celui que ce dernier s’invente grâce aux silences que le texte contient et la marge d’interprétation qu’il permet. Cette collaboration symbiotique entre auteur et lecteur démontre combien la poésie, plus peut-être que tout autre art, est phénomène de société.
Jean Botquin

mercredi 4 mai 2016

Oasis

 À Mohamed El Jerroudi.
Oasis
Je me brûle les pieds jusqu'à tes parois de sable
Je marche vers toi avec ma soif d'aimer
les lèvres desséchées par la poussière de la haine
Je me brûle les mains dans mes tâtonnements
d'aveugle que le soleil harcèle
Je me brûle la peau pour atteindre ta fraîcheur
différence arrachée au souffle torride du chergui
chargé des brûlures du grand Erg éternel
Césure profonde de ton corps de femme
balancement de palmes et verdeur inespérée
bouche béante comme une source
jaillissant du sein de la terre
Concert inattendu dans le désert de silence
et dans la nuit aux myriades d'étoiles
qui me recouvre de sa djellaba noire
au capuchon argenté par la lune
les pieds rafraîchis par le sable tiède
des ruelles du ksar où traînent des moutons bêlants
et des chiens au teint de chacal
tandis qu'Allah se plie aux caprices
du Muezzin qui répète combien il est grand
Oasis, ton visage apparaît dans le mirage de chaleur
vibrant au creux de ma mémoire dont tu t'évades
vallée de palmiers-dattiers
dont j'imagine les fruits de soleil
de sucre et de miel
fouillis inextricable de lauriers roses
cultures prises au filet
des canaux qui les irriguent
eaux sourdant de partout comme des vérités éphémères
pour abreuver les racines
et mourir dans les sables
dont tu surnages, oasis, comme par miracle
Oasis, avec tes champs de maïs
aux épis dorés
Oasis, comme un dernier refuge
avant l'enfer où je me brûle
la plante des pieds et les mains
qui t'abandonnent
femme étendue qu'un jour ou l'autre il faut quitter
A cause du nectar dont est remplie
la source de tes yeux
à cause de tes formes qui épousent
les failles de la terre
que tu caches sous l'opulence
momentanée peut-être provisoire
de ton paradis terrestre
menacé de toutes parts
Femme, comme une île
qui accueille les naufragés
ceux qui soudainement se brûlent la peau
à ta sensibilité
à tes frémissements
à tes murmures sous les palmes
de tes sources bleues aux poissons sacrés
ceux qui se brûlent à ta fraîcheur
parce que tu es l'exception
à laquelle personne n'est préparé
parce que tu es la plaie verte de la solitude
où croisent les caravanes
celles qui ressemblent à ces vaisseaux fantômes
sur la mer
dont notre sensibilité à tout jamais porte la marque
caravanes de souvenirs dont tu brises
la marche
Oasis, comme un arrêt dans la fatigue
des grandes étendues
Foum
ouverture sur la plaine
sur la chaleur des pierres
où je me brûle les pieds jusqu'à tes parois de sable
avec ma soif d'aimer
les lèvres desséchées par la poussière de la haine
où je me brûle les doigts
à vouloir t'arracher, femme, de mon cerveau
où je t'avais plantée comme une oasis
dans le désert des terres hostiles
J.B. in Triangles de la nuit des temps
ouvrage préfacé par son excellence Monsieur l'Ambassadeur du Maroc, Mohamed Rachad Boublal.
éditions Mémory Press 1998
Illustré par la peintre Thérèse Van Beveren
J’aimeAfficher plus de réactions
Commenter

Le Serpent

Le serpent
Et dans cet univers
moi
je ne savais qui j'étais
Peut-être
cet homme qui se comportait
comme un serpent pour traverser la rue
Dans notre vocabulaire on dit rue
alors que l'espace entre deux rangées de bâtiments
n'est qu'un espace de terre battue
de terre ferme où l'on peut marcher sans se tenir au bastingage sans ramper d'un bord à l'autre
comme un serpent dans la poussière
Cet homme je l'avais vu traverser entre les véhicules
traverser sur le ventre comme s'il n'avait ni jambe ni pied
Il portait des souliers
dans lesquels il me semblait qu'il aurait pu marcher
Mais il ne marchait pas
il rampait
comme un soldat entre les tirs d'obus
Il avait quitté le café avec des coups de pieds dans les guibolles
dans ses pauvres pattes folles
parce qu'il avait tendu la main
en s'appuyant sur le coude pour un dirham
ou l'équivalent de ce qu'il faut pour manger
l'équivalent d'un dirham ou quelque chose de semblable un peu de kif peut-être ou l'équivalent d'autre chose
à boire ou à fumer
Il traversait à la nage
comme un nageur paralysé des deux jambes à la force des deux bras
d'un bord à l'autre
Un paquet de loques
un vêtement bougeant de l'intérieur
et qui se déplace sur le sol d'un village présaharien à la force des bras
à qui on refuse l'urgence de l'aumône
cinq fois par jour
mais est-ce un homme ?
Un homme comme moi
avec un sexe et des pensées
avec le moi de vous aussi
que j'aurais dû serrer contre mon coeur tout contre vous
tout contre moi
sans avoir peur
de ce qu'il cachait sous ses hardes
et que j'aurais lu dans ses yeux
J.B. in Ténéré 2004
éditions Mémor Bruxelles.

La cage d'escalier

La cage d'escalier
Dans la cage d'escalier, un homme seul, ni jeune ni vieux. Il gravit les marches. À chaque étage, une fenêtre sur l'automne, le jeu coloré des pommiers, les pleurs jaunes d'un saule, les chanterelles tapies dans l'herbe. À chaque étage, la cage s'allonge vers le ciel qu'un lanterneau capte à la manière d'un oeuil de lumière. Plus l'homme monte, plus le puits se creuse dans l'ombre. Des marches, toujours des marches et des barreaux et, à chaque étage, une porte close comme une femme qui se tait. L'homme monte, la main sur la rampe. Une cage, oui, et voilà qu'un oiseau bat des ailes, volant d'étage en étage, pris d'une sorte de folie prisonnière. Il vole, butant sur les vitres d'automne. Il fuit le pas lourd de l'homme qui fait craquer les marches. Enfin, il se perche sur une des trois cariatides soutenant le plafond, tandis que s'ouvre la dernière porte devant laquelle l'homme s'est arrêté et par où apparaît une femme qui se tait. Elle ouvre la fenêtre par laquelle l'oiseau s'envole vers l'automne et le jeu coloré des pommiers. Quand la fenêtre et la porte se sont fermées, la cage d'escalier redéploie sa perspective de barreaux et de marches qui s'était arrêtée de monter. Et toutes les portes des étages se murent, à nouveau, dans le silence d'une femme qui se tait.

J.B. in "Le front Haut"

lundi 11 avril 2016

Des pas dans le sable

Je ne sais si l'on peut marcher pieds nus
tant le sable est brûlant
dès le lever du soleil
et les pierres tranchantes comme des couteaux
affutés
Mes pas courent sur le fil à découdre
le moindre de mes efforts
J.B. in Ténéré, 2004 éditions Mémor
Photo prise dans le Wadi Rum 2010
Jordanie.

mercredi 6 avril 2016

La diversité

La diversité
Ne nuit pas au partage-
Tableau printanier
J.B.

mardi 5 avril 2016

Les épousailles du cerisier

Les nuages tracent
Les contours du cerisier
D'un coup de pinceau
J.B.

Peau rouge

Peau ROUGE
Aux cicatrices blondes-
Cerisier du ciel
J.B.
Cerisier du Tibet
au Parc de Mariemont

Jonquilles du Lundi.

Jonquilles du lundi
Sur un champ d'automne passé-
Printemps étoilé
J.B.

Extrait de Passage des heures de Fernando Pessoa.

Quoi qu'il en soit, il eût mieux valu ne pas naître,
Parce que, aussi intéressante qu'elle soit à tout moment,
La vie finit par faire mal, par provoquer la nausée, par déchirer, par frotter, par grincer,
Par donner envie de crier, de bondir, de rester par terre, de
sortir
De toutes les maisons et de toutes les logiques, de sauter de tous les balcons,
De redevenir sauvage pour mourir parmi les arbres et l'oubli,
Parmi les chutes et les périls et l'absence de lendemain,
Et tout cela aurait dû être quelque chose plus conforme à ce que je pense,
À ce que je pense, ou à ce que je sens — et j'ignore ce que c’est — ô vie.
Je croise les bras sur la table, je mets ma tête sur mes bras,
Et j'ai besoin de pleurer, mais je ne sais pas solliciter les larmes...
J'ai beau m'efforcer de me prendre en pitié, je ne pleure pas, Mon âme est fendue par l'index crochu qui la touche...
Que vais-je devenir ? Que vais-je devenir ?
Extrait de LE PASSAGE DES HEURES Fernando Pessoa
Ode sensationniste
Lecture postérieure aux attentats de Bruxelles de Jean Botquin

Safran

Sur un lit de feuilles
Les crocus ouvrent leur coeur-
Rêve de safran
J.B.

Primevère



La primevère
Au pied du saule endormi
Annonce le printemps
J.B

Les abysses.






Pense à la nuit
aussi ténébreuse
que les abysses
d'ou naissent
les amours.
J.B in Le passeur d'un fleuve trop court 1998 memory press p.28