vendredi 31 octobre 2008

L'enfant à l'endroit, l'enfant à l'envers de Nicole Versailles


Si vous lisez ce livre vous n'apprendrez rien que vous ne sachiez déjà, à tout le moins si vous avez mon âge, ou tout au plus un peu moins que moi, à condition de ne pas avoir perdu la mémoire des greniers encombrés de bons et de mauvais souvenirs.



Si vous êtes beaucoup plus jeune, vous serez peut-être un peu étonné que les choses se passaient comme cela dans nos familles, selon des schémas assez uniformes, en présence de parents assumant des rôles d'éducateurs assez rigides, motivés, à juste titre, croyait-on, par des convictions reçues d'antan et agissant pour le bien de tous, à commencer de celui des enfants et le respect de sacro-saintes règles ayant force de loi au sein des microcosmes familiaux.



On ne peut pas en vouloir à la narratrice d'avoir eu envie de faire renaître le passé et son enfance, même si certains ne l'ont pas trouvé à leur goût. Absolument rien d'injurieux en cela. Souvent les pères étaient absents et les mères déprimées et omnipotentes. Ou l'inverse. Ce fonctionnement des familles a laissé des traces, parfois très douloureuses. Comment s'en débarrasser sinon en en parlant, et, en l'occurence, O combien gentillement, avec retenue et amour. Il est possible qu'aujourd'hui on en aurait parlé plus tôt, on se serait expliqué plus jeune, ou on n'aurait peut-être pas du s'expliquer, les choses s'étant passées autrement. Et encore, il n'est pas sûr du tout que tout se passe simplement dans les familles d'aujourd'hui, recomposées ou non.



Alors, je retire ce que j'ai suggéré. Cet enfant à l'envers qui vaut bien l'enfant à l'endroit, il suffit de le regarder du bon côté, convient à tous les âges et à toutes les générations, surtout de la manière dont Nicole Versailles en a parlé, avec sa spontanéité habituelle et son savoir dire et son savoir écrire qui coule de source.





Tu vois Coumarine, j'ai lu ton livre. Et je me suis même permis de l'aimer beaucoup. Aussi je le recommande à tous ceux qui visitent mon blog.

mardi 28 octobre 2008

Auteurs à suivre aux Editions namuroises." Les conquêtes véritables" de Nicolas Marchal


J'étais président du jury qui a choisi ce lauréat parmi d'autres, ce qui est toujours tâche difficile et hasardeuse. Tout de suite, j'ai été séduit par "Les conquêtes véritables", ouvrage d'une grande finesse et d'une grande originalité. Il me semble qu'il se détachait du lot par sa légèreté, son humour et sa poésie. Un livre pas comme les autres qui mélange avec élégance les conquêtes guerrières et celles, plus subtiles, de la littérature, à travers Céline, Cendrars, Rimbaud, les dieux de l'Olympe de Nicolas Marchant, comme l'écrit Paul Emond dans sa jolie préface...Ce livre ne m'as jamais ennuyé. J'en ai fait plusieurs lectures et, à chacune d'elles, je découvrais d'autres choses. Quel plaisir de le voir enfin imprimé sous sa couverture rose !

Et au niveau de l'écriture ? Je copie Paul Emond:
Bref, un récit par bribes, jouant sur de multiples strates narratives et usant en permanence de l'ellipse, du discontinu, de la reprise, de la parallèle. Pas de temps mort, pas de transition pâteuse, sans cesse l'écriture est au plus vif. Roman aussi éclaté qu'éclatant. Mais roman montage aussi, et même roman macramé (...), car, qu'on ne s'y trompe pas , rien dans cette anarchie n'est laissé au hasard; aussi précise que discrète une architecture d'ensemble organise avec subtilité tous ces fils qui filent dans tous les sens.

La diffusion est assurée par les Presses universitaires de Namur, 13 Rempart de la Vierge, à Namur.
Tel 081 724884
Fax 081 724912

dimanche 26 octobre 2008

Toutes les bulles ne sont pas financières ou papales


La bulle



Une bulle ? Cela n'existe pas.

Vous dites ? L'illusion d'un vent, une membrane de nébuleuse éphémère, un futur éclatement de ciel prisonnier, un tremblement transparent d'une peau de lait avide d'air, une boule de phosphore sur le point d'exploser, qui se pose d'abord sur le doigt, un souffle, une queue de nuage qui s'effiloche, un monocle de sulfure ?

Rien, la bulle, tout, la bulle ?

Le vide élastique où je place mon mot, pour rire bien sûr, petit facétieux, à moins que ce soit une larme en bulle ou une bulle en larme, à moins que ce soit -pfuit - une échappée pour ne rien dire, un satellite insignifiant, un trou de l'air de ne pas y toucher.

Vous dites que ça n'existe pas ?
Nom d'une pipe, soufflez dedans, soufflez.
Voilà, les voilà, les bulles. Une, deux, trois, quatre. J'arrête. Je ne les compte plus. Elles sont là, irisées dans le soleil, elles montent, elles vous entraînent, avec leur air de bientôt vouloir se suicider dans l'atmosphère, nirvana, plus rien, la sérénité, non, encore un petit arc-en-ciel de poche, attention, ne touchez pas la bulle, elle est ensorcelée, elle est magique, attention, elle tremble comme un nouveau-né, non non ne la touchez pas, laissez-la vivre, elle n'en a plus pour longtemps.



J.B.

vendredi 24 octobre 2008

Charme du roman d'un académicien français aux nouvelles du conteur belge Jean Botquin

Voici l'article tel qu'il a été publié dans le supplément Iire de la Libre Belgique du 24 octobre 2008. Cliquez sur l'article pour le lire en grand.
Une plume au chapeau !

Agrandissez le texte en cliquant dessus.

Voilà que La Libre Belgique, sous la plume de Jacques Franck, m'associe au charme littéraire d'un académicien français, Philippe Beaussant. Je rougis de plaisir et ne résiste pas à celui de vous le faire savoir, séance tenante.
Sous le sous-titre "L'oeil aiguisé d'un conteur" je lis avec vous:

Son imaginaire, toujours surprenant, débouche souvent sur un fantasque explosif, voire érotique. Qu'il évoque un cadavre repêché dans le Canal du Centre, l'acheminement en Wallonie d'une gondole dont son gondolier ne veut pas se séparer à l'heure de la retraite, les corps qui s'attirent ou se repoussent, il est de ceux qui aident à voir la vie, le monde, d'un oeil aiguisé, plus éveillé, plus insolite.

Le journal du Centre me fait honneur (semaine du 20 au 25 octobre)

Si vous voulez lire cette interview, cliquez sur le texte et faites le glisser de droite à gauche. Mon livre est toujours diffusé en librairie, notamment chez "L'écrivain Public" à La Louvière.

lundi 13 octobre 2008

Le temps des Don Quichotte

Illustration du peintre français Gustave Doré
pour le Don Quichotte de Cervantes, en 1863.


Les jambes écartées par l'échine de Rossinante, Don Quichotte chevauche à travers la Mancha.

Ombre d'une ombre irréelle, il avance sur les béquilles du rêve vers Cuenca. Il tourne le dos aux moulins invincibles qui coupent l'air à coups de rasoir gigantesque.
Il abandonne le combat inutile.
Il va vers Cuenca, la belle appuyée contre les parois du ciel.

Suffit-il d'un plat à barbe pour paraître chevalier ?
Qui n'a dans son sillage un Pança plus savant que lui-même ?
Tu sers ma pensée, Pança, tu me suis partout sur les chemins torrides et solitaires.
Tu justifies à toi seul mon besoin d'exister. Tu écoutes mon chant nostalgique et les horreurs joyeuses de ma dérision.

Suffit-il de la jupe odorante de Dulcinéa pour croire au repos éternel, à la résurrection du désert, à la pluie des illusions retrouvées ?

Nous avions le regard hagard et lourd de folie.
Nous étions enfiévrés et brûlants comme si le feu coulait dans nos artères.
La fièvre dansait sous nos tempes.
Nous étions fous, pareils à Don Quichotte, le chevalier à la triste figure qui traversait les hauts plateaux enflammés par nos tristes prières.


J.B.


Le carrousel



Cette photo d'un beau manège appartient à Fanfan (Id 19890) 13-5-2005. Je l'ai cueillie sur le Web Site Fond d'image.com .

Le carrousel

Sur le cheval, le blanc aux yeux d'ivoire, la licorne aux ailes d'ange, tu montes et tu descends, en tournant, tournant toujours d'un tour à l'autre. Et tu tournes dans les miroirs où je te vois autant de fois, mille fois, je crois dans ma mémoire. Tu apparais puis disparais, mes yeux te suivent, te poursuivent. Jusqu'où pourront-ils te voir à chaque tour et te revoir ? Seule sur le carrousel, tu montes et tu descends. Ton rire éclate, tu tournes dans ma tête aux sons des orgues foraines, tes cheveux dansent, tes reins se cabrent. Chaque fois tu pars et tu reviens, tu entres, tu sors de la lumière, tu viens du rêve, la nuit te va, ton sommeil traîne dans ma mémoire. Où suis-je donc ? Où es-tu donc dans cette ronde qui n'en finit pas. Ton sourire passe. Tu passes, tu tournes, tu te détournes, tu fuis, tu t'échappes rivée à ce cheval ailé qui ne peut s'envoler puisqu'il est de bois

J.B. Le front haut p.20

mardi 7 octobre 2008

Le Parc naturel de la Maremme ( Toscane-Italie)






































Quelques images de la Maremme que nous venons de découvrir.

Imaginez une plage de sable fin de plus de huit km couverte de squelettes d'arbres morts, blanchis par la mer et le vent, pins d'Alep, oliviers, chênes verts dénudés qui, le soir, prennent des formes dantesques à vous donner de la chair de poule . La plage et la mer au coucher deviennent lunaires tandis que les vagues s'éteignent dans un long chuchotement de larmes. Une espèce de peur commence à vous tenailler tellement la solitude s'agrandit autour de vous qui devenez minuscule. Vous vous êtes rhabillé, non pas qu'il fasse froid depuis que le soleil se cache mais parce que l'instant est solennel comme dans une église. On se mettrait bien à genoux dans le sable pour balbutier une prière dont on se souviendrait. Le sable est encore chaud. Et vous sentez la création du monde venir vers vous à grand pas.

A la lumière du jour, le Parc revit. Face aux chevaux, les petites vaches grises courbent l'échine pour vous faire admirer leurs cornes d'ivoire. Vous restez des heures à les regarder. Et elles vous regardent aussi avec une douceur presque insupportable. Vous vous sentez libres dans ce pays de fin du monde, au bout des terres habitées. Le temps, comme on dit, s'est arrêté. Vous oubliez d'où vous venez et où vous allez.

L'habitation qui nous a hébergés se trouve dans une exploitation agricole à Alberese, tout contre le Parc naturel de la Maremme.

Je m'appelle Europa









Marianne et moi revenons de la Maremme, cette région sauvage de la Toscane où paissent des petites vaches superbes aux cornes acérées, courbées et dorées comme des cercles solaires. En les voyant, j'ai pensé au jeune taureau de Pasiphaé de la civilisation Crétoise qui donna naissance à Minos, roi de Knossos en Crète, et qu'on appela le Minotaure. En Egypte ancienne, c'est une vache qui incarne la déesse de l'Amour, la déesse Hathor. J'ai raconté tout cela dans la nouvelle qui ouvre mon dernier recueil, en transposant de manière allégorique le récit de la mythologie crétoise dans un cadre moderne avec des personnages actuels, une famille comme il en existe partout et où l'entente est aussi difficile qu'en Europe d'aujourd'hui. Mon jeune personnage féminin qui se dore au soleil de la mer Egée fait un rêve qui rappelle étrangement les effusions de la nymphe Europa avec le superbe animal que Zeus a incarné pour la séduire. Animal sacré s'il en est, la légende ne pouvait mieux choisir.
Une dame m'a posé la question si mon récit était inspiré par un désir d'homme que j'aurais prêté à une femme ou par un véritable désir de femme ? Autrement dit, pareil fantasme est-il possible dans la tête d'une femme ? A vrai dire, je n'en sais rien, et je souhaite rester au niveau de l'allégorie. Cependant, ayant écrit ce rêve et l'ayant attribué à une femme, je me suis rendu compte de la puissance des images lorsqu'elles ont un caractère insolite et qu'elles sortent des normes. L'érotisme tel qu'il apparaît dans ce texte revêt un caractère sacré et quasi religieux. Ce qui est en train de se passer relève de l'ordre du possible; le rêve devient réalité. L'invraisemblable n'est plus.

Revenons à la Maremme que j'aimerais illustrer de quelques photos à faire rêver comme je cherche à faire rêver les lecteurs de mes nouvelles. Une de mes lectrices m'a confié qu'elle ne lisait pas les nouvelles comme elle lit un roman. Elle attend du nouvelliste qu'il construise ses nouvelles en laissant de la place au lecteur qui doit pouvoir s'approprier les personnages. Ces derniers ne ressembleront pas nécessairement au modèle de leur auteur. Le lecteur les verra comme il les imagine. Il les aimera s'ils correspondent à son attente ou ne les aimera pas. Il risque aussi de se faire une opinion sur leur auteur qui déçoive ce dernier. La nouvelle serait-elle donc un genre dangereux à manipuler avec prudence ? En tout cas, c'est un genre difficile.

Donc, voilà la Maremme, ce far-west italien.

jeudi 2 octobre 2008

La poésie

Hier j'ai lu un tas de choses sur la poésie. Chez Coumarine qui traite de tant de sujets, au fil des jours.
Aujourd'hui je reprends la lecture de La preuve par le miel, un livre de Salwa Al Neimi, une écrivaine Syrienne. Un livre vivant, vibrant comme un coeur dans la poitrine ou, en certains chapitres, dans le sexe d'une femme.
Et je tombe sur une page qui parle de poésie, que j'ai envie de reproduire ici:

"Toujours, il récitait de la poésie. Des poèmes entiers qu'il apprenait par coeur ou bien qu'il me lisait, et je l'imaginais en train de les réécrire, pour moi seule.

La poésie était-elle une des clefs de mon corps?

La poésie était entre nous. Il m'aimait avec les vers des autres. Lorsqu'il partait en voyage, il me téléphonait pour me donner le nom d'un recueil ou d'un poème. Je cherchais le poète, je lisais les mots et je me rendais compte qu'il était avec moi.

Pessoa, Cavafy, Char, Michaux et d'autres que je ne connaissais pas. Je suis devenue comme lui. J'apprenais les poèmes arabes que j'aimais, je les répétais pour lui seul.

La poésie était-elle toujours entre nous?

Avec lui, j'ai repris l'écriture de mes petits poèmes, rite initial de chacune de nos rencontres. Il s'enquérait de mes mots. En silence, je lui tendais le poème. Il lisait comme s'il partait à la découverte de ma face obscure, masquée par la frivolité et mes éclats de rire. Il découvrait ce que je n'osais pas m'avouer à moi-même. En silence, il repliait le papier avec soin et le glissait dans sa poche.

Mon corps était-il une des clés de la poésie?"

Sans commentaires.