samedi 31 décembre 2011

Le Nouvel An du temps qui passe


Temps qui passe
N'a cure d'un nouvel an
Temps trébuche et trépasse
Tout le temps
Temps renaît à chaque instant
Dans l'espace du sable du temps
Temps beau
Temps laid
Visages des humeurs d'antan
Ne sont que sourires ou grimaces
Du même temps fugace
S'envolant sur les ailes
Du vent
Mais toi qui sait arrêter le temps
Même s'il avance tout le temps
Habille-le d'espace
Et de rêve
Fais-le marcher
A ta manière
Avec les béquilles de l'arbre-poète
Les fragrances des roses-soeurs
Les rires francs des frères-m'as-tu-vu
Le souffle de la maman-alizée
Les baisers du papa-donne-des-bizous
L'amour des enfants-perce-neiges
Qui naissent dans le nid de l'espérance
A chaque instant vers l'au-delà

Jean Botquin,

31 décembre 2011


lundi 26 décembre 2011


Deux poupées sous un parapluie
(inédit de Jean Botquin)



Attendre

En imperméable transparent

La pluie qui fait la romance



T’attendre

Avec ton cœur de bois

Ton ventre de cuir

Tes prunelles de porcelaine de Bruxelles

Tes boyaux de parchemin

Ta zaza de dentelles



M’attendre

Avec mon parapluie de Paris

En soie de Lyon

Tendue sous le ciel

De la pluie démentielle

Le zizi virtuel

Les pieds dans le ruisseau

Le nez retroussé

Sous les fesses rebondies

De mon petit parapluie



T’attendre

Sous le toit de ma douche

Sous la pomme du déluge

Les culs nus sous les gouttes

Le zizi effronté

La zaza ensoleillée















Tableau de Sylvano Siscato

mardi 20 décembre 2011

Novembre et décembre en haïkus de J.B.


Pointent les bourgeons

D’un magnolia squelettique

A quand le printemps

+

Voiles gris d’automne

Sur la rangée de frênes

Frissonnant de brume

+

L’automne se languit

Comme l’été qui n’en peut plus

De ne pas s’éteindre

+

Ils passaient tous l’air

Vague et lourd suspendus

Aux poutres du plafond

+

Il tuait les temps morts

S’épuisant à ne rien faire

Tout le reste du temps

+

Les portes closes

S’ouvrent grandes aux pensées

Du silence pesant

+

Violon et cello

Sonorités de cœurs fragiles

Virtuosité

+

Nous perdons la terre

Comme une flottille de pêcheurs

Qui a levé l’ancre

+

Le jardin secrète

L’hiver sur le linceul

Des saisons mortes

+

Délabrés les arbres

Pleurent sur un tapis feuillu

La violence du vent


lundi 19 décembre 2011

Le bâtisseur. Inédit de Jean Botquin



Moi, je n'habiterai jamais la vallée car elle se terre hors la lumière comme un animal qui meurt. Le jour n'y est jamais qu'un prélude à la nuit retenue sur les sommets de l'angoisse, au-dessus des versants, au-delà de l'horizon invisible, par-delà les forêts qui déversent une peur noire dans l'eau des torrents.

Non, je n'irai pas me terrer dans une vallée quoiqu'il m'arrive, même si l'on me fait la guerre. Je veux vivre à la lumière du jour sous la crête des étoiles.

Ainsi parlait-il tandis qu'il construisait sa maison sur la plus haute terrasse de la colline, plein sud.

Il mit un siècle à la construire car il la voulait toujours plus grande comme une cathédrale de verre d'où il pouvait voir la mer à travers le ciel éclatant.

Toute la colline se couvrit d'un immense labyrinthe de couloirs sans début ni fin. Une forêt de colonnes soutenait des nuages de toitures percées de tuiles transparentes et d'étoiles. De loin, du fond des vallées, la maison brillait, même la nuit, pareille à un diamant énorme ou un phare du bout du monde.

On disait qu'il bâtissait un observatoire, peut-être un palais dont la luminosité serait sans frontières.

La lune resplendissait sur les vallées de larmes. Les torrents couraient toujours plus vite dans un concert de galets toujours plus grand vers les gorges taillées sous des édifices de roches qui tremblaient dans le vent. Certains arbres se plaignaient lugubrement de leur sort. On pouvait croire que la clarté revendiquait sa part de ténèbres.

Et, là-haut, il continuait inlassablement le travail gigantesque d'une vie dont la mort paraissait impossible. La vieillesse, il ne fallait pas en douter, s'éterniserait jusqu'au néant fragile de son coeur.

jeudi 15 décembre 2011

Le mur des lamentations. Inédit de Jean Botquin


Mur des lamentations



Chaque jour le même chemin sans arbres

Les mêmes jardins sans fleurs

Le même théâtre en noir et blanc

Le même voyage dans la nuit sans lune



Chaque jour porter à bout de bras la même chose

À un autre endroit où elle servira aux mêmes fins

De la même manière qu’elle ne servait déjà

Hier et qu’elle ne servira demain



Chaque jour les mêmes gens

Toujours habillés de la même façon

Bien coiffés bien entretenus sans surprise

Qui me ressemblent tous sortis du même ventre



Des frères et des sœurs que je ne connais pas

De n’importe quel âge aussi jeunes que vieux

Compagnons depuis la naissance jusqu’à la mort

Parenthèses du néant



Comme si nous étions tous des cellules

Identiques d’un même corps cosmique

Tous à nous regarder avec amour ou avec haine

Selon que nous nous aimons ou détestons nous-mêmes



Chaque jour les mêmes sourires les mêmes pleurs

Les mêmes pierres dans les yeux

Les mêmes cris dans les oreilles

Comme en voyage nocturne dans un métro sans fin



Un métro où enfin on s’est assis

À défaut de pouvoir se coucher et dormir

Jusqu’à la fin des temps

De la fatigue éternelle

mardi 6 décembre 2011

Quand j'avais vingt ans. Poème inédit.


Quand j’avais vingt ans …



Regards  de mes sœurs

Je ne puis vous attendre

L’heure des étoiles sous vos voiles succombe

Je ne puis vous apprendre les gestes incompris

Les éclairs fougueux et les accalmies

L’heure n’est plus



J’ai marché des jours entiers vers la mer

Semant derrière moi mes rêves d’enfant

Les rires cristallins les billes d’agate

J’ai foulé les jeux mélancoliques

Inscrits dans mes souvenirs nostalgiques

Regards de mes sœurs

L’heure n’est plus



Je cherche  le trésor de l’armada sabordée

Sous les basses nuées bouchant ciel et mer

Je cherche les îles arrimées au Levant

J’espère retrouver les vaisseaux brûlés

Les réponses posées aux questions

Anonnées en vain tant de fois



Vous êtes là Ô mes sœurs

Déesses brumeuses toujours renaissantes

Vos visages m’invitent au silence

Vos mains froissées par les vents

Vos lèvres gercées par le sel des tempêtes

Vos corps somptueux dressés à l’horizon des lagunes



Regards de mes sœurs

L’heure n’est plus

L’heure des doux parlers au seuil  du mystère

L’heure des cantilènes et des langues de miel

N’arrêtez pas ma marche vers la mer

Vers les îles de l’imaginaire inaccessible



Jean Botquin







  










samedi 3 décembre 2011

Il est temps d'oublier. Poème inédit de J.B.


Il est temps d’oublier


Toute la tristesse du monde m’inonde
En ce largo d’un autre temps
Les violons pleurent
Saules tremblant sous le vent
Et secouant la pluie d’orage


Symphonie où se noie mon âme
Cuivres funestes des armées célestes
Cris de joie envolés écartelés par l’esprit
Galopant solitaire sur les terres maudites


Je suis loin de l’ivresse
Dans mon ventre se tord un sarment
De tendresse méconnue arrachée de force
Par d’obscurs trombones désespérés

Nos cœurs roulent-ils
Pierres affolées sur les pentes des marées
De nos chevelures échevelées
Gonflées par les tempêtes du Nord
Qui nous terrassent


Les heures se font froides
Nos yeux se givrent
Les doigts gourds craquent
Bouts de bois secs au bruit de silex
Résonnant dans l’unique vallée de mon cœur