dimanche 2 janvier 2011

Le Non-Dit n°90 janvier 2011 Jean Botquin et le haïku par Michel Joiret


"Les choses de la vie" en quelques mots...


On pourrait parler d'une séduction mutuelle, d'un tracé consensuel. Le haïku se trouve au clair sous la plume de Jean Botquin et le poète puise dans le genre un aliment de premier choix. Bréviaire d'un Quotidien fait suite au surprenant recueil La chambre noire du Calligraphe. Il rassemble des haïkus qui obéissent à la règle classique et contraignante des 17 syllabes. Mais la clef de la réussite échappe à la mécanique formelle. Elle tient surtout à une perception, presque miraculeuse, de l'instant, à ce mouvement tout à la fois léger et précis qui isole une image du reste du monde. Botquin s'illustre dans le genre et dans la netteté du propos. Des haïkus comme "Le salon des mots/S'endort dans un ronflement/ De dictionnaire". "Un bruit d'horloge/Réchauffe le temps qui fuit/ D'un pas régulier". Et si la pratique du haïku assurait la maîtrise du temps ? On peut se poser la question à propos d'un livre qui prend ses assises dans le souffle, la méditation et la lenteur. Le poète procède délicatement, par glissements d'images, par permutations sémantiques, par le choix délibéré de la légèreté: "La neige vole/ Dévoile ses flocons blancs/ Repos des couleurs". L'inspiration n'est pas de mise; la prise en compte de l'instant suffit. Et nous savons que pour l'observateur éveillé, toute séquence brève passe pour une figure d'éternité. Jean Botquin ne cesse de l'appeler, de l'interroger, d'en déplacer les pièces comme s'il s'agissait d'un puzzle improbable, un idéogramme, un mobile protéiforme: "Le temps s'arrête/ Là, au départ de l'hiver/ D'un songe amer".

Le lecteur tente de saisir le mot qui passe, de prendre en compte le paraphe d'un instant et de s'en remettre à l'impromptu du sens. Il se rend compte alors que la dérive chaloupée du haïku lui conte bien davantage que sa propre intelligence des mots.

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