lundi 10 août 2009

KIKI 3




Bientôt Kiki s'est retrouvée toute seule. Sa mère tuée dans notre rue, ses frères disparus, ses grands parents disparus. Elle gardait cependant quelques amis et prétendants qui lui faisaient la cour mais surtout essayaient de conquérir une partie de son territoire. Elle ne s'éloignait jamais loin de notre jardin. De temps en temps, on lui laissait un peu de nourriture, pas trop pour qu'elle continue à se débrouiller, à chasser. Quand nous rentrions, par exemple de voyage, elle nous attendait en miaulant. Nous la récompensions avec quelques friandises. Ce n'était pas vraiment une chatte domestique mais il existait une espèce de lien entre elle et nous. Elle aimait jouer avec les pies, un couple qui dansait autour d'elle quand elle prenait le soleil sur la pelouse, l'air de rien. Elle ne les aurait pas attaqués car elle était trop petite pour le faire. D'ailleurs, nous avons toujours pensé qu'une de ces pies lui avait abîmé une oreille, et qu'elle avait retenu la leçon. Elle ne fuyait plus quand nous allions vers elle, à condition de ne pas esquisser une caresse. Parfois, quand la porte de la cuisine était ouverte, elle s'aventurait prudemment à l'intérieur, sans doute pour susciter une réaction de notre part, puis elle sortait en nous tournant le dos.


Quand nous avons prolongé la maison par une pergola, il nous a semblé qu'elle a cru que nous lui avions construit une maison, pour elle seule. Elle s'y est installée. Ses copains jaloux venaient la voir du haut du muret qui borde la terrasse. Elle les surveillait depuis le banc où elle passait de longues heures. Comme elle quittait de moins en moins le jardin, nous avons commencé à la nourrir un peu plus souvent. Nous étions pris dans un cercle vicieux.


Le dernier hiver a été très froid. Nous ne voulions pas qu'elle meure de froid, aussi nous lui avons construit une niche chaude, protégée du vent. " Uniquement pour la durée de l'hiver, mademoiselle Kiki, cette chambre à coucher n'est pas définitive, et pas question d'y inviter des copains. Au printemps, retour à la nature ! "


Elle est morte au début du mois de juillet. Quel âge aurait elle aujourd'hui ? Plus de sept ans, selon de vieilles photos de nos albums que j'ai parcourus après son décès.


Pendant plusieurs jours, elle avait disparue. Elle ne revenait pas. Nous ne savons pas ce qui lui est arrivé. Quand elle a réapparu dans le jardin, nous l'avons appelée. Elle n'entendait plus son nom. Ses oreilles ne se dressaient pas à notre appel. Nous avons essayé de la faire boire un peu, et manger. Elle ne portait aucune marque de blessure mais avait beaucoup maigri. Elle miaulait faiblement, se traînait complètement épuisée comme si elle revenait d'une marche de centaines de km. Elle s'est assoupie sous le houx où elle n'allait jamais.


Le lendemain matin nous l'avons trouvée, raide déjà, sous le grand réservoir d'eau de pluie où nous avions, sept ans plus tôt, hébergé toute la nichée de Tigresse.

5 commentaires:

pierperrone a dit…

A volte le storie di animali sono dolci e tristi come quelle di esseri umani. Ma la natura compie tra gli animali una specie di giustizia che gli uomini, invece rifiutano.
Ma si tratta di un vano rifiutarsi.
Quella specie di giustizia gli uomini la chiamano "destino". Non si tratta di giustizia equa. Ma di "legge di natura".
(Parfois, les histoires d'animaux sont doux et triste comme peuvent êtres celles des hommes. Mais la nature exécute entre les animaux une sorte de justice qui les hommes refusent.
Mais cela est inutile de refuser.
Les hommes appellent cette forme de justice "destin". Ce n'est pas
une justice juste. Mais elle est une loi de la nature.)

jean.botquin a dit…

Quelqu'un m'a dit, quand Kiki est morte, que ce n'était qu'un animal; pour moi c'est un être vivant et la vie mérite le respect. Bonnes vacances., Piero. Mon livre est parti vendredi matin.

Un petit Belge a dit…

Jean, si vous en avez le temps, votre avis serait intéressant pour le petit débat littéraire que je viens de lancer sur http://journalpetitbelge.blogspot.com et sur http://ecrivainsbelges.blogspot.com

BOL a dit…

J´ai bien aimé ce nouveau conte du chat perché.

jean.botquin a dit…

Une histoire vraioe qui ressemble à un conte...Bol!