dimanche 14 août 2011

Le poisson de la Saint Jean. Texte de Jean Botquin. In "Le front haut".


Dans mon rêve, j'étais un poisson se tortillant sur le sable, la proie de l'étouffement et des rapaces. Rejeté de mon élément naturel, j'allais mourir. J'étais déchu des anges, j'étais vomi par la mer. Je serais ta proie, Saint Jean. Tu m'écaillerais l'âme avec ton bec d'Apocalypse et tes griffes d'Evangéliste. Tu ouvrirais mes entrailles. Tu m'arracherais le coeur et l'estomac. Froid de marbre, froid de sang, froid d'espérance, mon oeil blanc te regarderait une dernière fois, Saint Jean.
À moins que tu ne m'aies pris dans ta douceur de disciple préféré, d'adopteur de mère abandonnée, à moins que tu ne m'aies bercé dans tes griffes tendres, que tu ne m'aies poussé vers la mer sans me balafrer le ventre, sans me brûler de ton feu sacré.
Et je rêvais d'un soleil d'ambre, du soleil que l' ombre des îles me cachait, de l'écume des rayons, de la poudre d'insectes de mer, des algues quasi immobiles dans le fond des océans et au milieu desquelles je nagerais comme un poisson rejeté à la mer par ton amour, Jean, ou ta condamnation.
Pourquoi n'ai-je pas rêvé que j'étais une hirondelle ? Ainsi tu ne m'aurais pas reconnu, Saint Jean et tu m’aurais laissé seul dans mon rêve.

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