
Quant à mon recueil de nouvelles "La Gondole de l'Orient Express", mon blog et la presse en ont beaucoup parlé.
J.B.
Le train est donc reparti. Les voyageurs inquiets ne se sont plus posé de question. D'ailleurs, on peut affirmer que ceux qui dormaient ne se sont pas réveillés, même quand la femme a crié.
On monte dans le train comme on monte dans la vie. On prend sa place et tout se passe bien. Il fait encore jour. Les paysages défilent derrière les vitres. Quelques rares voyageurs plus attentifs que les autres reconnaissent les collines, et les arbres, et les maisons. Ou ils s'en souviennent vaguement comme s'ils les avaient vus dans un voyage ou une vie antérieure.
D'autres, plus nombreux, ne reconnaissent rien bien qu'ils aient l'habitude de faire le trajet, parce qu'ils ne regardent jamais rien. D'autres encore font semblant de reconnaître ce qu'ils voient pour se rassurer et ne pas avoir l'air stupides. La plupart cependant dorment et ne s'intéressent à rien. Ils vivent comme s'ils n'étaient pas là.
Plus d'un mangent, pris de boulimie voyageuse. A peine installés dans la vie, ils se mettent à grossir. Ils deviennent obèses. Ils se remplissent de nourriture et de vide. Ils croient tout savoir sur le voyage, les arrêts et les gares de campagne où personne ne descend plus même quand les gardes ouvrent les portières et sifflent pour rien.
Pourquoi sont-ils montés dans la vie comme on monte dans un train qui ne va nulle part ?
Enfin, longtemps plus tard, quand le train freine avant la dernière gare, ils meurent, oubliant qu'ils sont nés de rien et qu'ils se sont trompés de vie et de train.
J.B. 26 novembre 2008
N.B. Ce texte existe aussi en Italien sur le site Reppublicaindipendente (voir"liens")
Un instant j'ai vu l'arbre transparent
en filigrane sur le ciel
une feuille translucide d'où s'évaporent les nervures
tel un tissu de radicelles
tel un fouet de pluie
tel un miroir de soleil d'eau picoré de rêves d'oiseaux
aujourd'hui envolés
à l'extrême des brumes d'un été déjà lointain
avec au centre des veinures
un coeur battant encore du souvenir
que recueillent les tombes
Dans tes yeux aussi je l'ai vu
l'arbre
dans tes yeux ouverts sur le vieillissement
de nos gestes et sur la solitude embaumée
des chrysanthèmes qui se fanent
Alors que les jours expriment la rouille
les fauves et les ocres lumineux
et que les vents accourent du fond des terres
J.B. 20 novembre 2008
Le tableau ci-dessus appartient à la collection de la Banque Bruxelles Lambert (actuellement I.N.G.). Il porte le titre: "Marie Antoinette escortée à la guillotine" Peintre Zuka. Cette photo est également reproduite dans les exemplaires dits de prestige de L'arbre des exécuteurs.
La photo ci-dessus reproduit une allée du cimetière du Dieweg, à Uccle.voir www.pragstorage.com/photos_3/cimetiere_dieweg
C'est un des cimetières les plus romantiques de Bruxelles. Il n'est plus guère exploité et la nature l'envahit de plus en plus. Hergé y est inhumé.
J.B.
Cette photo d'un beau manège appartient à Fanfan (Id 19890) 13-5-2005. Je l'ai cueillie sur le Web Site Fond d'image.com .
Le carrousel
Sur le cheval, le blanc aux yeux d'ivoire, la licorne aux ailes d'ange, tu montes et tu descends, en tournant, tournant toujours d'un tour à l'autre. Et tu tournes dans les miroirs où je te vois autant de fois, mille fois, je crois dans ma mémoire. Tu apparais puis disparais, mes yeux te suivent, te poursuivent. Jusqu'où pourront-ils te voir à chaque tour et te revoir ? Seule sur le carrousel, tu montes et tu descends. Ton rire éclate, tu tournes dans ma tête aux sons des orgues foraines, tes cheveux dansent, tes reins se cabrent. Chaque fois tu pars et tu reviens, tu entres, tu sors de la lumière, tu viens du rêve, la nuit te va, ton sommeil traîne dans ma mémoire. Où suis-je donc ? Où es-tu donc dans cette ronde qui n'en finit pas. Ton sourire passe. Tu passes, tu tournes, tu te détournes, tu fuis, tu t'échappes rivée à ce cheval ailé qui ne peut s'envoler puisqu'il est de bois
J.B. Le front haut p.20
Quelques images de la Maremme que nous venons de découvrir.
Imaginez une plage de sable fin de plus de huit km couverte de squelettes d'arbres morts, blanchis par la mer et le vent, pins d'Alep, oliviers, chênes verts dénudés qui, le soir, prennent des formes dantesques à vous donner de la chair de poule . La plage et la mer au coucher deviennent lunaires tandis que les vagues s'éteignent dans un long chuchotement de larmes. Une espèce de peur commence à vous tenailler tellement la solitude s'agrandit autour de vous qui devenez minuscule. Vous vous êtes rhabillé, non pas qu'il fasse froid depuis que le soleil se cache mais parce que l'instant est solennel comme dans une église. On se mettrait bien à genoux dans le sable pour balbutier une prière dont on se souviendrait. Le sable est encore chaud. Et vous sentez la création du monde venir vers vous à grand pas.
A la lumière du jour, le Parc revit. Face aux chevaux, les petites vaches grises courbent l'échine pour vous faire admirer leurs cornes d'ivoire. Vous restez des heures à les regarder. Et elles vous regardent aussi avec une douceur presque insupportable. Vous vous sentez libres dans ce pays de fin du monde, au bout des terres habitées. Le temps, comme on dit, s'est arrêté. Vous oubliez d'où vous venez et où vous allez.
L'habitation qui nous a hébergés se trouve dans une exploitation agricole à Alberese, tout contre le Parc naturel de la Maremme.